Résumé de la conférence de Pascal David au Cercle Ernest Renan le 8 octobre 2024 — Quelle religion Simone Weil pratique-t-elle ?

pierre Comptes Rendus, Philosophies juillet 30, 2025

Introduction

 

Pascal David est dominicain, professeur d’université à Lyon où il enseigne la philosophie. Il a rédigé sa thèse de doctorat sur Simone Weil et il est notamment l’auteur de l’ouvrage : “Simone Weil – Un art de vivre par temps de catastrophe”.

 

 

Présentation de Simone Weil

 

Simone Weil (1909-1943) est une philosophe qui, au cours de sa courte vie, s’est notamment intéressée aux questions de spiritualité et de pratique religieuse.

Elle a vécu durant une période troublée entre les deux guerres mondiales. Son œuvre est principalement connue à titre posthume.

Simone Weil est d’origine juive, mais a été élevée dans un milieu totalement agnostique. Elle a été proche des courants marxistes mais a toujours refusé les appareils et notamment le stalinisme et le communisme.

Au niveau philosophique, Simone Weil n’a pas construit de nouveau système, mais a transposé la pensée de Platon pour notre époque.

L’unité de sa vie et de sa pensée s’est faite à l’école des grecs.

Simone Weil quitte la France en 1942 et travaille auprès du Général De Gaulle.

Elle meurt en Angleterre en 1943 de tuberculose, de malnutrition et aussi de désespoir de ne pas avoir été envoyée en mission en France.

Au cours de sa vie, elle a circulé dans différents milieux sociaux sans vraiment appartenir à aucun.

Elle a toujours considéré que le monde était contradiction et qu’un monde sans contradiction ne pouvait pas être pensé.

 

 

La religion pour Simone Weil

 

Simone Weil se méfie de l’Etat, de l’Eglise et plus globalement des institutions. Pour elle, les groupes et les partis annihilent la pensée personnelle.

Chez Simone Weil, il n’y a pas de religion dans le fait d’adhérer à un groupe ou à une idéologie, mais il existe une pratique philosophique qui l’a conduite à une expérience mystique.

La religion est vécue par elle comme une expérience, mais elle n’est pas pratiquante.

Dans son autobiographie spirituelle de 1942, elle témoigne de son parcours spirituel : après une période de travail en usine où elle découvre la condition ouvrière et fait “l’expérience du malheur”, elle voyage en Espagne et au Portugal où elle rencontre des communautés chrétiennes villageoises qui se rassemblent pour prier. Ensuite, à Assise, elle découvre la beauté du monde.

Sa découverte du christianisme à partir de l’expérience est vécue comme un acte politique.

Chez Simone Weil, ce sont les contacts et l’expérience qui ont toujours orienté son existence.

Pour elle, le christianisme est la religion des esclaves et comme une esclave, elle comprend le catholicisme.

Simone Weil reprend l’idée stoïcienne d’entrée en religion et tend à établir une continuité entre stoïcisme et catholicisme, entre Homère et les Evangiles.

Elle considère que la forme de vie prônée par les stoïciens se rapproche de celle des chrétiens. Mais elle demeure critique en considérant que le catholicisme moderne a oublié le monde et doit revenir aux principes du stoïcisme.

Pour Simone Weil, être chrétien, c’est pratiquer une certaine manière de vivre, mais ce n’est pas nécessairement croire en Dieu. L’importance, pour elle, c’est d’avoir ou non l’expérience de Dieu.

Simone Weil rejette la religion comme source de consolation.

Enfin, Simone Weil estime que le problème de l’existence de Dieu est insoluble et par conséquent elle pratique une forme de christianisme sans Dieu.

 

 

La Vérité chez Simone Weil

 

La notion de vérité est importante chez Simone Weil. La vérité vient de l’expérience et consiste à rencontrer le réel. Cette rencontre de la vérité se fait par l’Amour.

La vérité, par définition, choque et bouleverse nos certitudes de classe.

On accède à la vérité par le désir et le devoir d’attention. L’attention est un exercice ultime, une forme de prière qui permet de s’orienter vers Dieu.

Simone Weil témoigne d’une expérience mystique à la fin des années 30 où “le Christ est descendu et m’a prise”. Le Christ qu’elle décrit est le Jésus de l’Evangile et aussi Dieu. Cette expérience mystique est de l’ordre de l’Amour, Amour qui seul permet d’accéder à la vérité.

Pour Simone Weil, le malheur est notre condition et le christianisme est relié au malheur. La Croix est, en même temps, le lieu de la vérité et du plus grand malheur.

A notre mort, ce qui reste de nous, c’est la vérité à laquelle on est parvenue. Il n’y a pas d’espérance de survie après la mort et dans l’au-delà, on ne se revoit pas.

On s’évanouit soit dans l’amour de Dieu, soit dans le néant et on rate ainsi sa mort. Simone Weil considère que le sujet est sauvé par la vérité et elle a peur de rater sa mort.

 

Simone Weil et la foi

 

Pour Simone Weil, la foi n’est pas une opinion, mais une certitude et c’est une expérience éclairée par l’Amour.

Le dogme, quant à lui, ne doit pas être affirmé, mais orienté et offert à l’attention.

Ainsi, dans l’espace public, la religion ne doit pas avoir de pouvoir mais elle permet d’ouvrir un certain regard.

Elle s’oppose au Dieu décrit dans l’Ancien Testament qui exerce sa force. Elle prône l’idée d’un ordre religieux qui ne soit pas séparé des hommes.

Pour elle, l’homme n’a pas à chercher Dieu. Seul Dieu peut descendre vers nous.

Simone Weil et la spiritualité

 

Pour Simone Weil, la spiritualité est un ensemble de pratiques de rapport à soi qui sont nécessaires pour avoir accès à la vérité. Et elle considère que le sujet est sauvé par la vérité.

La production du savoir ne dépend pas de la manière de vivre, mais il faut se transformer pour devenir apte à la vérité.

Elle souhaite renoncer aux principes de la force et elle considère que le bien se diffuse par contact et non pas d’en haut.

Simone Weil a eu un grand intérêt pour l’Orient et sa spiritualité, mais elle n’a eu le temps de le développer.

 

Les études en vue de l’amour de Dieu

 

Simone Weil estime que l’attention vers les grands textes en vue de découvrir une vérité permet de détruire le mal en soi. Pour cela il faut pouvoir réciter les textes dans la langue de l’auteur. Elle considère que les études universitaires n’ont pas vocation à apprendre mais à donner la capacité de faire attention.

 

 

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